"Clergue fut sans doute le seul témoin de la naissance d'Aphrodite"       cit. Jean Cocteau
Je comprends aujourd’hui combien mon existence a basculé le 7 février 1971, à Châlon-sur-Saône.
Mes yeux d’adolescent découvraient, émerveillés, les photographies de Lucien Clergue, nus de la mer, aux cimaises du musée Nicéphore Niepce.
« Née de la vague » est sans doute le livre auquel je tiens le plus.
***
C’est avec le SEMFLEX 6x6 familial  que je fis mes premiers clichés,  un ZEISS IKON Icarex 35 S  me permit d’user d’un format plus commode, j’appris les joies et les difficultés du développement des films et des tirages papier  auprès des collaborateurs du magasin « AU DEPART »  à Dijon et ai vécu bien des week-ends cloitré  dans le couloir de la chaufferie de la maison, sous les rayons de la lampe inactinique, attendant la révélation de l’image.
Vint le baccalauréat, l'époque où il ne fallait pas songer à des études artistiques dans un milieu tel que le mien.
Par bonheur Jean-Marie Baufle, photographe au Muséum d’Histoire Naturelle du Jardin des Plantes à Paris avait accepté de me recevoir pour évoquer mes souhaits de devenir photographe animalier. Il m'a persuadé de faire des études de biologiste avant toute chose.
Convaincu, j'ai donc fait des études de biologie. A l'Université de Besançon, dans le Doubs, puis à celle de Neuchâtel, en Suisse. Je suis donc bien biologiste.
***
Pourtant je ne suis pas devenu photographe animalier mais artiste-plasticien. Toujours une affaire de regards et sensibilité finalement.
Retour sur le chemin de la félicité.
C’est un terme commode, plasticien, pour ceux qui refusent le confort et préfèrent se retrouver classer dans plusieurs tiroirs, où les seules parois que l’on rencontre sont définies par nos propres choix.
Les rencontres de Bernard Buffet & de Paul Rebeyrolle,  les soutiens de peintres Pierre Bichet & Jean-Claude Bourgeois,  la complicité de l’écrivain Pierre Perrin, mon épouse Gabrielle m'ont apporté le terreau indispensable à mes créations réalistes.
Pendant plus de vingt années mes efforts ont surtout porté sur la peinture par les techniques mixtes et sur les estampes, gravures et monotypes, éditions restreintes et livres objets. Sans oublier les carnets d'émotions où les techniques se perdent et s'entremêlent. La magie du noir & blanc, de l’estampe qui se découvre sous les langes de la presse comme celle de la photographie qui se dévoile dans le révélateur sont bien proches l’une de l’autre. Une histoire de papier-rêve.    
***
J'aime.
J'aime tout ce qui marque l'histoire d'un être dans son coeur dans son corps.
J'aime les calligraphies que la vie laisse sur la peau au fil du temps en paysages sans cesse différents à contempler.
J'aime aussi les lieux où ses corps s'épanouissent aiment, souffrent se réunissent se construisent.
J'aime les forêts les plaines les vallées les déserts les montagnes.
J'aime la pluie les ruisseaux les rivières les fleuves les mers.
J'aime les villes les villages les hameaux les campements.
J'aime les monuments les immeubles les ruines les tas de cailloux le sable.
J'aime les voyages la moto les chaussures de marche les sacs à dos.
J'aime la littérature la poésie la musique la philosophie.
J'aime les arts les galeries les musées les expositions.
J'aime l'étranger la différence l'humain.
J'aime le temps la beauté la laideur la vie.
J'aime les images les émotions.
Depuis quelques années,  après une période gratifiante humainement mais paupérisante au niveau créatif, la photographie d’auteur m’a happé, aspiré et inspiré pour un renouveau sans cesse recommencé.
La vie reprend, créative et surprenante.
Un nouveau tiroir est ouvert, accueillant.
La Côte-aux-Fées, Val-de-Travers,
Libéré-confiné en ce 28 avril 2020

You may also like

Back to Top